Die DEM aus französischer Perspektive

Schreibt direkt aus Paris: Laurent Freyd

2006 hat erstmals ein französischer Schiedsrichter das Team der DEM verstärkt. Laurent Freyd hat seine Eindrücke im Schiedsrichter-Nachrichtenblatt der französischen Föderation veröffentlicht. Natürlich auf französisch.

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Dans la série "Arbitrer à l'étranger": Le championnat d'Allemagne des Jeunes

27 juin 2006, 22h: La France affronte l'Espagne en huitième de finale de la Coupe du Monde de football. 1 partout, la deuxième mi-temps va bientôt commencer et les supporters des deux camps chantent à tue tête … Ca me rappelle l'ambiance qui régnait déjà il y a trois semaines, à Willingen, petit village en Upland, comme dans toute l'Allemagne. Le paysage se peuplait peu à peu de drapeaux de toutes les couleurs et de supporters en tous genres. Vous l'aurez deviné, ce n'est pas le foot qui m'amenait chez nos cousins germains, mais bel et bien un tournoi d'échecs.

 

En-dehors de grandes batailles sur l'échiquier, les tournois sont d'excellentes occasions pour les joueurs de rencontrer de nouveaux amis partageant la même passion. Pour les arbitres, c'est pareil ! Juillet 2005, championnats du monde des Jeunes à Belfort, la France accueille des arbitres des 4 coins du monde, dont un Allemand, Rainer Niermann, avec qui le courant est très bien passé. Comme 2 joueurs devenant amis, nous trouvons naturellement un moyen de "faire" un prochain tournoi ensemble : Rainer, en tant que superviseur du Championnat d'Allemagne des Jeunes (Deutsche Einzel Meisterschaft ou DEM), m'invite à rejoindre son équipe pour l'édition 2006 (j'en faisais de même avec l'accord de notre DNA pour Aix-les-Bains, mais mon ami n'a pas pu se libérer). J'accepte la proposition avec la plus grande joie en me disant qu'il y a vraiment une justice dans la vie : mes années de scolarité à suivre les cours d'allemand à reculons vont enfin m'être utiles !

 

Revenons donc quelques semaines en arrière, que je vous fasse partager ma petite aventure dans ce premier arbitrage à l'étranger étrennant de manière fort sympathique mon titre d'AF tout neuf …

Jeudi 1er juin : les préparatifs – die Vorbereitung

Pour éviter que je me perde en chemin, je vais rencontrer, Kevin, un ami de Rainer qui participe à l'organisation du tournoi. Nous reviendrons sur son rôle un peu plus tard. Petit tour sur un site d'itinéraires en ligne, pour m'assurer que 6 heures suffisent pour rejoindre Dortmund depuis Cergy-Pontoise. Appel téléphonique pour se mettre d'accord sur un rendez-vous : 14h à Dortmund. Kevin m'accueille avec un enthousiasme qui fait très plaisir et comprend tout de mon allemand, c'est bon signe !

Vendredi 2 juin : le voyage – die Fahrt

Debout à 7 heures, je finis de préparer mes affaires, prends une bonne douche, puis ce sont les au revoirs avec Julia qui, ne parlant pas un mot d'allemand, participera à l'aventure par procuration.

8h30, le plein d'essence est fait, les pneus gonflés, je peux lancer ma fidèle 106 sur la route du DEM.

10h30, l'unique péage de la journée est en grève … Je laisse toute ma menue monnaie aux grévistes pour qu'ils se paient à déjeuner, c'est toujours mieux que le prix du péage …

12h45, j'entre en Allemagne, quasiment dans les temps. Début des travaux …

13h30, j'ai fait 20 km de plus …

14h, j'appelle Kevin :"J'ai été ralenti, je suis entre Wuppertal et Leverkusen, mais ça roule à nouveau". Réponse : "Pas grave, je suis encore en train de faire mon sac ..."

14h30, en fait, je n'ai fait que 3km de plus, Kevin peut passer chez le coiffeur en attendant que j'arrive : la radio dit "Sechzehn Kilometer Stau". Pour les non initiés : sechzehn = 16; Stau [_tau] = bouchon … Tiens, à ce moment précis, je suis à 500 Km de Berlin ! Voyons le bon côté des choses : si le trafic avait été fluide, je n'aurais pas vu l'ours.

Bref, vers les 16h30 j'arrive à Dortmund avec 3 heures de retard. Coup classique, je me perds dans les explications de Mappy entre la dernière indication autoroutière et la première citadine … Quelques détours plus tard, je dépose ma voiture chez Kevin et nous partons à bord de sa camionnette toute décorée par le ministère des sports, destination … une nouvelle autoroute embouteillée. A 19h30, nous arrivons enfin à Willingen et Rainer vient nous accueillir.

Après ce grand moment de retrouvailles, nous allons déposer nos bagages à la chambre. J'ai oublié de dire que le championnat a lieu au Sauerland Stern Hotel, un complexe hôtelier 4* où toute la manifestation est concentrée (hébergement, repas, tournois, animations …). Dîner, puis visite des locaux et présentation des diverses équipes.

Freizeit Team : Equipe divertissements – c'est l'équipe de Kevin. Ils sont 6-7 et leur mission est de s'occuper des enfants lorsqu'ils ne jouent pas aux échecs, à travers des animations et des jeux.

Öffentlichkeit Team : Equipe relations publiques – encore 6 personnes pour gérer la communication.

Bulletin Team : celle-ci, c'est la cousine germaine de Joelle Mourgues ...

Schiri Team : c'est nous, les arbitres (Schiedsrichter en version littéraire) !

Tout le monde accueille le petit français dans la bonne humeur et nous entamons la semaine avec une première soirée de travail (finalisation du règlement pour l'open des grands, préparation des fichiers d'appariement pour la gestion informatique. En allemand, PAPI se dit SwissChess) qui se termine vers les 2h du matin, fatigués, mais motivés pour la suite des événements !

Samedi 3 juin : la cérémonie d'ouverture – die Eröffnung

Nous nous accordons une grasse matinée, car la semaine promet d'être chargée, en commençant par l'installation complète de la salle …

13h – 15h : Comme chez nous, pour les arbitres, le championnat commence officiellement par une réunion. Tour de table, présentation de l'organisation générale, bref récapitulatif sur les règles du jeu (un genre de formation continue en Blitz) : en vrais sportifs, nous nous échauffons !

15h – 19h30 : En marge du pointage (Anmeldung) pris en charge par la Freizeit Team et 2-3 arbitres, nous terminons la préparation des cavaliers avec les noms des joueurs et les tableaux d'affichage. Autant parler de calme avant la tempête, car le DEM commence le samedi soir par une cérémonie d'ouverture dans la même salle que le tournoi qui débute … à 8h30 le dimanche !

19h30, cérémonie d'ouverture : Jörg Schulz, Président de la Fédération d'Echecs Jeunes (Deutsche Schach Jugend ou DSJ, prononcer "d-s-iott"), accueille les 700-800 personnes présentes, avant les discours officiels, ponctués par un retour sur la saison passée, la nomination de l'entraîneur et des jeunes de l'année 2005. Enfin, chacune des 17 délégations est présentée (joueurs les plus connus, résultats, nombre de licenciés et de clubs …) un hymne est joué lorsque leur porte drapeau défile et monte sur scène, pour le lancement officiel de la semaine de championnat, par le Vice-Président de la DSJ, Patrick Wiebe. En parallèle, les appariements de la première ronde sont affichés pour être consultés dès la fin de la cérémonie.

21h, le début des hostilités : l'équipe technique de l'hôtel prépare les tables et les chaises selon le plan de table établi, dresse des nappes de couleur pour différencier les tournois, pendant que les arbitres mettent en place les jeux, numéros de tables, feuilles de parties (et sous-mains), cavaliers et pendules (je découvre un modèle peu commun chez nous : les pendules labellisées par l'European Chess Union. Elles sont grises à bouton clignotant, un peu moins ergonomiques que les DGT XL, mais semble-t-il plus économiques à l'achat. J'en profite pour en empocher une que je rendrai le lendemain matin, avec sa notice, histoire de réviser au calme de la chambre et d'être prêt à les manipuler pour la première ronde). Au milieu des tables de jeu, trois petites scènes accueillent les tables d'arbitrage, véritables postes de pilotage.

23h, réunion d'équipe : la grande salle est presque prête, nous faisons une pause pour que chacun puisse faire connaissance avec l'ensemble de l'équipe. Chaque responsable d'équipe présente sa Team : une heure d'échanges sur fond de blagues et de bonne humeur. Les Allemands aiment bien faire des discours !

Dimanche 4 juin : la première ronde – die erste Runde

Schwartz oder Weiß (Noir ou Blanc …) … la la la la la … Dimanche matin, 8h26, l'hymne des jeunes joueurs allemands

réveille ceux qui seraient encore endormis devant l'échiquier et annonce le début imminent de la ronde. Chez les grands, la cadence de jeu est 2h pour 40 coups, puis 1h KO (pour les poussins et pupilles, la cadence est 1h30 pour 40 coups, puis 1/2h KO) … Dommage que je n'aie pas été accompagné d'une tribu de futurs AF4, car ils auraient eu de multiples occasions d'obtenir leur ANZ ! Les qualifications sont plus sélectives qu'en France : chaque ligue (Verband) n'a qu'un ou deux représentants, les tournois du championnat national comprenant entre 24 et 28 joueurs. Pas de catégorie junior, ni petit poussin. Cette saison un tournoi a eu lieu le premier week-end avec les moins de 8 ans. Un peu comme nos opens A et B, il y a un Open du championnat d'Allemagne, ouvert à tout joueur de moins de 25 ans. Avec mon collègue Fritz, nous sommes en charge des catégories U14W, U16W et U18W (U = unter, W = weiblich ; autrement dit de benjamines à cadettes), soit 80 joueuses.

15h30, début de la ronde 2. Le nombre de rondes est différent selon les âges : les moins de 12 ans jouent 11 rondes, les autres 9 rondes.

Vers 22h, nous faisons le point avec l'équipe d'arbitrage sur cette première journée : tout s'est bien passé. Aucun incident avec les parents et spectateurs qui se promènent dans les allées. Via le site Internet du championnat, www.deutsche-schachjugend.de/dem2006/, les fans et amis des joueurs peuvent envoyer des mots d'encouragement. En fin de soirée, nous nous transformons en "arbitres-facteurs" pour distribuer ces courriers amicaux …

Lundi 5 juin : la journée du Schleswig-Holstein (région proche du Danemark – ville principale Kiel)

Nouveau signe du rôle important joué par les délégations : chaque année, une journée est dédiée à l'une des régions allemandes. Cette année, ils ont choisi celle dont le nom est le plus difficile à prononcer … Les joueurs de la délégation en question offrent à leurs adversaires un panier avec des produits représentatifs de leur région.

Ce beau geste me donne l'occasion de parler de fair-play. Depuis plusieurs saisons, la fédération allemande a introduit des cartons de couleur au DEM pour mettre en évidence les comportements positifs (vert), manquant de fair-play (jaune) ou carrément anti-sportifs (rouge). Tous les membres de l'équipe organisatrice sont habilités à donner un carton, aux joueurs, comme aux accompagnateurs. Même Chessy, comme vous pouvez le voir. Chessy, vous l'aurez compris, c'est la mascotte du jeu d'échecs en Allemagne. Vous verriez les yeux rêveurs des plus petits lorsque ce drôle d'oiseau vient se promener dans la salle de jeu …

20h30, rendez-vous avec Michael Klein, rédacteur en chef du journal du championnat. Nous nous voyons pour répondre aux questions que tout le monde se pose : mais comment ça fonctionne en France ? Et qu'est-ce que je fais là ? Suis-je un espion ? On pourrait me traiter ainsi, mais nous nous sommes accordés sur le fait que partager nos expériences peut faire progresser les échecs français et allemands. Et nous comptons bien aider à développer les échanges entre nos deux fédérations !

Mardi 6 juin : le tournoi de GM – das Großmeister Turnier

A partir d'aujourd'hui le DEM accueille les dernières rondes du tournoi de Grands-Maîtres qui avait débuté à Hockenheim, en partenariat avec l'Académie Karpov. En parallèle, le jeune MI de 15 ans, Sebastian Bogner, donne une simultanée face à une trentaine de moins de 12 ans qui ne jouent pas cet après-midi.

22h30, réunion d'arbitres. Un incident a eu lieu, impliquant un accompagnateur chez les moins de 10 ans. Il est décidé de procéder à une journée de test, adoptant un mode de fonctionnement similaire au

nôtre le vendredi : seuls des accompagnateurs accrédités pourront entrer dans la salle de jeu lors de cette journée "à la française" ...

Mercredi 7 juin : la soirée Western – Deutschland sucht den Supercowboy

Nous atteignons la mi-tournoi, les séances de prise de Zeitnot ponctuent toujours les parties de ce championnat bien réglé. Hors de l'échiquier, la grande soirée ludique de la semaine aura pour thème le far west. Une bonne partie de l'équipe organisatrice est impliquée dans l'animation de l'événement, notamment Jörg Schulz (v. photo). Une cinquantaine de joueurs parmi les plus jeunes apprécieront l'ambiance "saloon".

Après cette petite récréation, je me remets au travail : je suis chargé d'organiser le tournoi de Blitz du lendemain. A la manière de la Coupe du Monde qui approche, nous optons pour un système coupe avec poules qualificatives, chaque équipe de 3 joueurs portera un nom de pays … Une fois les fiches d'inscriptions et d'appariement prêtes, je rejoins mes collègues du journal pour leur soumettre l'annonce à paraître. Comme d'habitude, j'ai mélangé 'die', 'der', 'das' et compagnie … Après quelques ajustements, l'annonce est prête et je peux rejoindre les collègues qui occupent comme chaque soir la Freizeit Keller (cave aux loisirs). Le jeu de la semaine est sans conteste Singstar, genre de karaoké sur console qui révèle indifféremment de beaux talents et des voix de casseroles, mais toujours pour une ambiance bon enfant !

Jeudi 8 juin : la coupe de Blitz de Chessy – Chessy Blitz Pokal

La journée du jeudi aura pour thème le Blitz. Dès l'après-midi, les petits qui n'ont pas de ronde jouent le tournoi des moins de 12 ans. Avec Chessy et Jürgen Müller, sympathique collègue bavarois, supporter du Bayern de Münich depuis 17 ans, nous prenons temporairement possession de la salle d'analyse pour les 6 équipes motivées. Une fois tous les participants récompensés, nous arrivons en renfort à la salle de jeu, peu avant le Zeitnot.

Le soir, place aux choses sérieuses : 36 équipes sont inscrites, soit 108 joueurs. Presque toutes les tables de l'open U25 seront occupées par la compétition. Huit groupes sont constitués, qualifiant chacun le 1er pour la phase finale (les suivants jouent une coupe consolante), puis en 3 tours, l'équipe vainqueur sera désignée. Le niveau est assez relevé, avec notamment la participation d'Elisabeth Paehtz, championne du monde junior, mais c'est Cuba, emmenée par Uwe Kersten, l'entraîneur de l'année, qui remporte la compétition. Excellente ambiance pour cette formule innovante.

Vendredi 9 juin : Barbecue – Grillen

L'avant-dernier jour de compétition est synonyme d'organisation de la remise des prix. Comme dans n'importe quel tournoi, le succès de la cérémonie découle d'une bonne préparation. Chaque enfant repartira avec une médaille à l'effigie de Chessy et une pochette contenant : 1 diplôme signé par l'arbitre principal et le président fédéral ; 1 exemplaire de la grille américaine du tournoi ; 1 magazine ; 1 CD-ROM Fritz 8 offert par ChessBase. Les joueurs seront gâtés et les arbitres sont sollicités pour que tout se déroule sans fausse note.

En soirée, la direction de l'hôtel convie toute l'équipe dans sa maison de chasse pour une soirée barbecue. C'est l'occasion pour moi de faire la connaissance de Klaus Deventer, membre de la DNA allemande qui rentrait tout juste de Turin, où il officiait en tant que Senior Arbiter (responsable d'un groupe d'arbitres) aux Olympiades. Entre deux grillades et un verre de vin, nous en profitons pour échanger sur nos organisations respectives. Cette semaine à l'étranger aura été fort instructive pour mes hôtes comme pour moi.

Ca y est, la France a battu l'Espagne et se qualifie pour les ¼ de finale ! A Willingen, mis à part les supporters qui chantent nuit et jour, la Coupe du monde de football ne s'immisce pas dans le DEM …

Samedi 10 juin : La remise des prix – die Siegerehrung

Je trouve le calendrier du championnat intéressant : deux journées à double ronde permettent de placer la remise des prix dès le samedi soir, un véritable événement festif partagé par tous (à peine 2-3 % des récompenses restaient à l'issue de la cérémonie). Les délégations quittent ainsi l'hôtel le dimanche matin en toute tranquillité.

Grande différence avec le système français, les ex aequo ne sont pas départagés sur l'échiquier, mais simplement avec les systèmes de départage standards, comme aux championnats du monde.

Dès les parties terminées, les arbitres éditent les classements et les publient. Les participants ont 1 heure pour déposer d'éventuelles réclamations. Pendant ce temps, l'équipe technique de l'hôtel remet la salle en configuration "gala".

19h, musique, jeux de lumière : le grand moment est arrivé ! Entre les lectures de palmarès, le public profite de véritables spectacles : démonstration de gymnastique, de violon et de piano par de jeunes champions, animations mettant à contribution les responsables de délégation etc … Tout le monde passe un très bon moment en point d'orgue du championnat. Par ailleurs, mes collègues m'ont concocté une petite surprise : au moment de remettre les prix de mon tournoi, Jörg m'offre un diplôme du championnat dédicacé par toute l'équipe, que je garderai bien précieusement en souvenir de cette semaine mémorable !

Dimanche 11 juin : le départ – die Abreise

Notre mission s'achève et il ne reste plus qu'à quitter les chambres et ranger les salles occupées par l'équipe avant de repartir en camionnette avec Kevin ... Au revoir Chessy, au revoir mes nouveaux amis … Mais rendez-vous l'année prochaine, car la Team m'a déjà réservé une place pour le DEM 2007 : avec une certaine fierté, je me dis que j'ai pu donner une bonne image des arbitres français pendant cette semaine. Je n'ai qu'un souhait à formuler : que nous puissions nous aussi accueillir des arbitres allemands dans nos tournois, afin de développer les échanges, pour le bien de notre passion commune !